Vint ans après :
des « faux » qui étaient… vrais
Au début des années 1980, est apparu en Europe occidentale (initialement à Paris, puis à Berlin, Zurich et Stockholm) un grand ensemble d’œuvres sur papier de Mikhaïl Larionov. Il était composé de plusieurs centaines de pastels, gouaches, aquarelles, encres de Chine, dessins aux crayons de couleur et autres techniques. Au cours de l’hiver 1984-85, on m’a demandé à plusieurs reprises d’authentifier des pastels, des gouaches et des aquarelles. Ces œuvres, inconnues jusqu’alors, m’ont d’abord été présentées avec des références fantaisistes, autant dire qu’elles n’avaient pas une provenance facile à vérifier. A ce moment, les archives soviétiques de même que celles de la veuve de l’artiste étant inaccessibles, il était pratiquement impossible d’effectuer des recherches documentaires permettant d’établir de façon indiscutable la provenance de cet ensemble1Les archives soviétiques de même que celles qui se trouvaient aux mains de la veuve parisienne de l’artiste restaient pratiquement inaccessibles. À l’époque, c’était d’ailleurs le sort d’une grande partie de la documentation concernant l’avant-garde russe, domaine qui depuis la chute du mur de Berlin a connu un essor sans précédant. En raison de l’état de santé de la veuve de l’artiste et en raison de sa dépendance de son marchand François Daulte cette documentation, disparue depuis la mort de Mme Alexandra Tomiline-Larionov manque cruellement aux chercheurs. Cette situation est bien relatée dans la correspondance que Mme Tomiline-Larionov a entretenue avec sa sœur cadette Xenia. J’ai pu accéder à cette documentation moscovite grâce au travail d’Aleksander Reijevski, avocat russe de la famille de Mme Alexandra Tomiline-Larionov.. Le jugement visuel, matériel et proprement stylistique restait en conséquence le seul moyen permettant leur attribution.
La grande majorité portait la signature ou bien le monogramme de l ‘artiste en caractères cyrilliques. Le plus souvent, ce furent des œuvres de très grande qualité, et, dans certains cas, d’un type alors encore inconnu dans la production du peintre. Les œuvres que j’ai eu à examiner, semblaient toutes dater de l’époque russe de l’artiste, c’est-à-dire d’avant l’été 1915. A ce moment, des œuvres sur papier de Larionov de ce type et de cette époque étaient peu connues en Europe occidentale et comme d’autres créations de la même mouvance définie comme « l’avant-garde russe » restaient très peu étudiées, gravement oubliées.
Répondant à une invitation de Diaghilev, en juin 1915 Mikhaïl Larionov quittait Moscou pour Lausanne en pensant revenir peu après en Russie. Gravement blessé sur le front – occidental (russe), le peintre s’apprêtait à effectuer un séjour de convalescence tandis que sa compagne Nathalie Gontcharova répondait à une commande de travail pour les décors des productions scéniques de l’impresario Serge Diaghilev, déjà célèbre hors des frontières russes. Profondément éprouvée par la blessure sur le front, la santé du peintre allait avoir par la suite une incidence néfaste sur sa création picturale, celle-ci ne faisant que décliner au cours des années vingt et trente et se dégradant encore plus fortement par la suite. Il ne serait pas exagéré de dire qu’il y deux peintres Larionov : avant et après 1915.
Partant de façon quasi improvisée pour un voyage qui se dessinait pour quelques semaines, au plus quelques mois, Larionov avait laissé l’ensemble de son atelier à Moscou. Installé définitivement à Paris à partir de la fin de l’année 1917, il a tenté au cours des dix années à venir de récupérer son œuvre russe. Au terme de grands efforts, il parvint au milieu des années 1920 à recevoir de Moscou un certain nombre de tableaux (huiles sur toile) de même qu’il put récupérer en Allemagne des tableaux qui, après l’exposition parisienne de 1914, avaient été expédiées au galeriste berlinois Herwarth Walden, en vue de leur future présentation dans sa galerie « Der Sturm ».
Une histoire censurée
Au milieu des années 80, quand j’ai pu examiner les œuvres sur papier dont il est question, la connaissance de la création de Larionov se trouvait encore dans une zone d’ombre : prohibé dans son propre pays en tant qu’émigré (« anti-soviétique ») et rejeté auparavant pour des raisons esthétiques, Larionov n’y était pas étudié et encore moins exposé. Son art restait toujours rejeté dans le purgatoire de la « décadence bourgeoise » et était de ce fait combattu par les gardiens crispés du « réalisme socialiste ». Ainsi, une rétrospective de l’œuvre de Larionov programmée en 1980 par le Musée Russe de Leningrad fut réduite au dernier moment au seul accrochage, tandis que la censure interdisait la publication du catalogue.
En Europe occidentale, la modeste documentation réunie péniblement par l’artiste, se trouvait aux mains de sa veuve parisienne, dont l’attachement fervent à la mémoire du peintre n’était pas secondé des compétences réelles en histoire de l’art. Âgée et malade, Alexandra Tomiline-Larionov (1900 – 1987) vivait en dehors de Paris. Installée à la fin de sa vie dans une clinique privée de Lausanne où elle avait été placée par François Daulte, son marchand suisse, Alexandra Tomiline-Larionov allait mourir le 14 septembre 1987. La date de sa mort aura, comme on va le voir, une importance non négligeable dans l’histoire qui suit.
Aujourd’hui, on doit rappeler que lorsqu’au milieu des années 80, j’ai eu accès à une bonne partie de ce large ensemble d’œuvres sur papier, les archives soviétiques étaient encore sévèrement interdites aux chercheurs aussi bien occidentaux que russes. Étant un des premiers à y avoir accès, j’ai pu y travailler moi-même seulement à partir de la fin de l’automne 1987, et ce, avec certaines restrictions, le sujet de mes recherches ayant été limité principalement aux créations de Kazimir Malewicz et Alexandra Exter.
En raison des interdits idéologiques, les travaux des historiens d’arts russes (alors encore « soviétiques » avec toutes les réserves d’autocensure qu’implique ce terme) étaient peu nombreux dans ce domaine. Et comme ces mêmes historiens de l’art allaient l’affirmer au printemps de 1988 dans les pages du journal officiel Sovetskaja Kultura, « la faute de la méconnaissance de l’œuvre de Larionov » était en premier lieu imputable à la situation (politique) russe : pour un historien d’art soviétique, il était non seulement déconseillé socialement, et en conséquence difficile de travailler sur ce sujet, mais c’était surtout improductif, car un pareil travail n’avait aucune chance de se faire connaître et encore plus reconnaître, une publication à ce sujet étant pratiquement inconcevable, comme le fut celle du catalogue de l’exposition de 1980.
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Comme j’ai pu le constater au cours de mes recherches ayant suivi la clôture de l’exposition 1987-88, le premier large groupe d’œuvres que l’on me demandait d’examiner à Paris au printemps de 1985 n’épuisait aucunement l’ensemble en question, mais la grande quantité d’œuvres que j’ai pu voir successivement, leur variété stylistique et avant tout leur très grande qualité plastique, m’ont rapidement convaincu que j’étais en présence de quelques « fond d’or » de Larionov. Les recherches que j’ai conduites tout au longs des années 1990 en Russie m’ont permis d’établir par la suite qu’il s’agissait tout simplement du meilleur de la production de l’artiste qui fut sauvé des pillages et des destructions qui à la fin de l’année 1918 et encore plus en 1919 résultèrent du désordre ayant suivi la Révolution d’Octobre. Peu après, l’accès à certaines sources privées, des discussions avec des collègues moscovites et non moins mon travail dans les Archives d’Art et de Littérature de Moscou (RGALI) m’ont permis de découvrir des informations fiables et des documents d’archives retraçant les pérégrinations de ces œuvres à partir de 19192Je fais référence à une lettre de la sœur de l’artiste – Alexandra Larionov, envoyée le 9 juillet 1919 à la Commission moscovite pour la protection des monuments et des œuvres d’art : elle faisait appel pour la protection de l’atelier de Larionov et celui de Gontcharova, menacés des pillages (archives RGALI,M- fond 680, IZO). Les effets de cette lettre sont attestés dans les carnets de Vinogradov, dont des extraits ont été publiés en 2001. Cf. bibl. Ovsjannikova 2001 (cité plus loin). Pourtant les carnets sont bien plus riches. Les péripéties de l’atelier de Larionov y figurent à plusieurs autres endroits que ceux mentionnés par Ovsjannikova et en particulier aux années 1922-1924. Malheureusement j’ai eu un accès très fragmentaire à ces carnets qui mériteraient une étude autrement plus systématique. jusqu’au début des années 1980.
Un art prohibé
J’ai pu ainsi apprendre à Moscou que l’existence de cet ensemble d’œuvres sur papier était connue à Moscou par les rares historiens d’art et de littérature qui, au cours des années soixante et soixante-dix se sont ’intéressés à la création de Larionov et au futurisme russe en particulier (Nikolaï Khardzhiev, Rudolf Douganov et surtout l’historien d’art Alexandre Kovalëv (1944-1992) dont les travaux allaient être publiés à titre posthume à Moscou en 20053A. E. Kovalëv, Mikhail Larionov v Rossii – 1881-1915 g.g. (Mikhail Larionov en Russie, les années 1881-1915) Moscou 2005, 622 pages (Éd. posthume) et 2ème partie du livre – anthologie de documents p. 323 et ss.. Des recherches en vue de l’exposition avortée du Musée Russe de Leningrad conduisirent Alexandre Goubarev, l’un de ses organisateurs, à s’occuper de ce fond d’atelier qui avant 1980 se trouvait toujours aux mains de l’architecte Nicolaï D. Vinogradov (1885-1980). Engagé dans les actions de protection des monuments historiques et des œuvres d’art, cet ami moscovite de Mikhail Larionov sauva, au cours des années vingt, le fond de l’atelier de l’artiste de la destruction4Cf. Ovsiannikova, E., « Larionov i Gontcharova. Materialy iz arhiva N. D. Vinogradova (Larionov et Gontcharova. Documents des archives de Vinogradov) in anthologie Larionov et Gontcharova. Issledovanija i publikacjj, Moscou 2001, p. 55 – 72. Dans la même publication, on trouve plusieurs lettres de Larionov, dont celle à l’académicien P. S. Kogan (le 12 février 1925) relatives aux œuvres sur papier, laissées à Moscou où le nom de Vinogradov est clairement indiqué.. Éloigné des milieux artistiques et ayant à la fin de sa vie pratiquement perdu la vue, Vinogradov, historien de l’architecture et archéologue qui n’avait jamais adhéré aux postulats de l’avant-garde moderniste et encore moins à celle « futuriste », s’était totalement désintéressé des archives de Larionov qui se trouvent en sa possession depuis plusieurs décennies, des documents, pour lui, « historiques » qu’il avait sauvés de ma destruction il y a fort longtemps et pour cette raison quelque peu oubliés… Ses rapports avec les conservateurs du musée Maïakovski, ravivés peu avant sa mort, allaient néanmoins faire découvrir une partie des vastes archives et collections hétéroclites de documents de tout genre que Vinogradov avait su préserver de la destruction anti-moderniste5Dans les carnets personnels de Vinogradov (coll. privée Moscou) on trouve le témoignage explicite de la dégradation dramatique de la situation socio culturelle et du danger que les rapports avec l’émigration « blanche » représentaient à ce moment pour le propriétaire de pareils archives. Les contacts avec le Musée Maïakovski avaient pour résultât l’achat par ce musée d’un grand ensemble d’affiches « Rosta » que Vinogradov avait réussi à sauvegarder. Les conditions matérielles, exceptionnelles pour son milieu et son temps et qui lui permirent de garder les œuvres sont indiquées de façon sommaire dans l’article de Ovsiannikova, op. cit.2001.. La suite fait partie des aléas dramatiques de l’histoire russe du vingtième siècle et, à la fin, de ceux de l’émigration, principalement juive qui s’est particulièrement accélérée à la fin des années troubles de l’époque bréjnievienne (les années 70).
Lors de mes premiers contacts avec une des grandes parties de cet ensemble, je fus surtout sollicité pour certifier l’authenticité d’œuvres « rayonnistes », car, à l’époque, seule cette partie de l’œuvre de Larionov bénéficiât dans le monde occidental de quelque intérêt. On ajoutera que cet intérêt se limitait à une poignée de connaisseurs.
La méconnaissance de la création de Mikhaïl Larionov de l’époque et en particulier le mépris dans lequel on tenait la production expressionniste et futuriste russe en général était telle que je n’ai pu découvrir l’existence des extraordinaires encres de Chine expressionnistes (portraits, scènes) que plusieurs mois plus tard, ce presque par hasard, car, les considérant « sans aucun intérêt » (sous entendu commercial), le propriétaire princeps n’avait même pas pensé me les montrer.
Historien de l’art intéressé à ce moment surtout par l’étude des origines de l’art abstrait, j’étais beaucoup plus attiré par les œuvres futuristes et expressionnistes car pour moi ces œuvres permettaient de comprendre la démarche de Larionov, d’accéder au principe même de son évolution picturale, donc à l’avènement du « rayonnisme », première floraison en Russie d’une peinture abstraite, issue de l’aventure impressionniste et futuriste de l’art moderne tout court.
Préoccupé avant tout par un travail de longue haleine concernant la création de Kazimir Malewicz, et tout en appréciant hautement la qualité des œuvres de Larionov, à l’époque je ne pouvais pas consacrer trop de temps à l’étude de cet ensemble d’œuvres sur papier. Cette étude aurait été d’autant plus laborieuse que l’accès aux documents personnels de l’artiste était bloqué par une veuve possessive, âgée et malade et par quelques marchands parisiens peu scrupuleux, circonstances qui n’encourageaient pas un travail exhaustif6Ainsi, une lettre que j’envoyais quelques mois avant l’exposition de Francfort à François Daulte, le marchand attitré de la veuve de Larionov, est restée sans réponse, d’autres fournissaient à dessein des informations erronées….
Regarder sans préjugés
À la fin de l’année 1986, j’ai été sollicité quasi simultanément par les directeurs de deux musées européens, le Musée d’Art et d’Histoire de Genève et la Schirnkunsthalle de Francfort, la dernière commençant à présenter des expositions consacrées à l’avant-garde russe, sujet qui éveillait l’attention un peu partout en Europe occidentale et en Allemagne en particulier. Faute de temps, je refusais dans un premier mouvement d’entreprendre tout projet d’exposition. Me rappelant néanmoins l’existence des œuvres sur papier de Larionov que j’avais examinées récemment, je proposais peu après leur exposition aux directeurs des deux musées. La réponse fut aussi immédiate qu’enthousiaste. La qualité des œuvres était l’argument majeur parlant en leur faveur. Poursuivant mon interrogation sur la voie qui a conduit Larionov à sa première abstraction, c’est-à-dire au rayonnisme de 1912, j’effectuais rapidement une sélection d’œuvres représentative de cette évolution et donnais en conséquence à l’exposition le titre bien significatif « La voie vers l’abstraction »7Michail Larionov : la voie vers l’abstraction. Der Weg in die Abstraktion. Catalogue bilingue par A. Nakov (commissaire de l’exposition).
Présentations :
a) Schirn Kunsthalle, Francfort, du 9 avril au 24 mai 1987.
b) Pinacoteca di Bologna, Palazzo Pepoli, Bologne, du 4 septembre au 26 octobre 1987.
c) Musée d’Art et d’Histoire, salles du Musée Rath, Genève, du 10 mars au 24 avril 1988.. Il me fut d’autant plus facile d’établir ma sélection, que comme me l’a dit l’un des propriétaires, « Ces œuvres sont peut-être intéressantes pour l’historien d’art que vous êtes, mais n’intéressent personne d’autre, elles sont tout simplement invendables. »
L’exposition fut montée en deux mois à peine : je rédigeais rapidement un catalogue où, faute de pouvoir commenter en détail les œuvres, tâche difficile sinon impossible à l’époque, je m’efforçais d’inclure tant bien que mal une substantielle partie documentaire. Ouverte le 9 avril 1987 à Francfort, l’exposition rencontra un indéniable succès8Voir dans l’annexe bibliographique les articles ayant commenté l’exposition de Francfort au cours de l’année qui a suivi son ouverture, c’est-à-dire avant le lancement du « scandale » genevois, avant avril 1988.
Bibliographie de l’exposition, car le public allemand était sensible à la qualité expressionniste de l’œuvre de Larionov, une œuvre étroitement liée à la création du groupe munichois Der blaue Reiter (Le Cavalier Bleu) avec lequel Larionov avait entretenu des contacts suivis au cours des années 1910, 1911 et 1912. Ayant établi à Moscou des rapports amicaux avec Vassily Kandinsky, Larionov avait invité plusieurs membres de ce groupe à participer à ses entreprises moscovites. En 1912, il avait à son tour pris part à Munich, à la deuxième exposition du « Cavalier Bleu ».
Mon authentification des œuvres de Mikhaïl Larionov fut unanimement acceptée; cette attribution fut immédiatement suivie dans le milieu professionnel par des collègues américains et européens qui rédigèrent rapidement des catalogues d’exposition pour des œuvres ayant la même provenance. Ces exposition9• Galerie Schlegl, Zurich, du 22 mars au 16 mai 1987. Catalogue illustré avec introduction par Philipp Ingold, slaviste zurichois.
• Galerie Aronowitsch, Stockholm, nov.-déc. 1987. Catalogue illustré (grand format) comprenant des textes de J. Bowlt, slaviste et universitaire américain et A. Parton, historien d’art anglais, auteur d’une thèse de doctorat sur Larionov. Cette thèse sera publiée en 1993 sous le titre Mikhail Larionov and the Russian Avant-garde, Thames & Hudson, Londres.
• A New Spirit, Galerie Barry Friedman Ltd., New York, nov. 1987, exposition collective incluant entre autres plusieurs pastels de Larionov de la même provenance. Catalogue illustré avec introduction de J. Bowlt.
• Trois pastels de la coll. R. Boulée, Paris sont inclus dans l’exposition 1912 – Brake up of Tradition/Traditions et ruptures, Winnipeg Art Gallery,Winnipeg, Canada, du 7 août au 4 octobre 1987, organisée par l’historienne d’art canadienne Louise d’Argencourt (Les œuvres sont commentées et illustrées dans le catalogue : cat. n° 54 et 163, ill. p. 133 et cat. n° 162, ill. p. 130).
• Exposition d’encres de Chine organisée à Montréal, été 1987, par la galerie Geerbrandt. En guise de catalogue fut publié un dépliant illustré. eurent lieu dans des galeries privées de Zurich, Stockholm, New York et Montréal, de même qu’au Musée d’Art Moderne de Winnipeg (Canada).
Par ailleurs, comme j’allais l’apprendre au cours de l’instruction de la bouche de François Daulte10Ceci eut lieu le 14 mars 1995 au cours d’une confrontation ordonnée par la juge genevoise. , Madame Tomiline-Larionov, veuve du peintre, avait également confirmé l’authenticité de ces œuvres, le catalogue de mon exposition de Francfort lui ayant été montré en mai 1987. Ainsi au cours de l’année 1987 les œuvres sur papier de Larionov de cette provenance gagnaient une indéniable reconnaissance, une notoriété.
Continuant sur la lancée de son succès de Francfort, l’exposition « La voie vers l’abstraction » fut présenté en septembre 1987 au Palazzo Pepoli de Bologne (Italie), ce dans le cadre d’une préfiguration du nouveau musée d’art moderne de cette ville11La réception fut aussi enthousiaste qu’à Francfort. Je citerais pour l’exemple l’article de Claudio Spadoni, « Futurista dell’Est – L’avanguardia di Larionov a Bologna » in Carlino Terza, Bologna le 19 octobre 1987.. Revenu à mes recherches sur Malewicz, je considérais cette expérience comme un chapitre professionnel de ma vie dorénavant clos. De plus, j’étais parallèlement engagé dans une entreprise de grande envergure : je préparais pour un ensemble de musées japonais (Tokyo, Kamakura) une grande exposition « Dada et Constructivisme »12Élue au Japon une des « dix meilleures expositions de l’année », cette exposition fut présentée au printemps 1989 au Centre Reina Sofia de Madrid.. Ce travail me passionnait ; il me conduisait en même temps dans une direction fort éloignée des préoccupations expressionnistes et rayonnistes de l’abstraction lyrique de Larionov.
Comment fabrique-t-on un scandale ?
En mars 1988, l’exposition « La voie vers l’abstraction» terminait finalement son parcours au Musée d’Art et d’Histoire de Genève où elle fut accueillie par la presse locale avec les mêmes éloges que ceux de l’année précédente en Allemagne13Au début l’exposition genevoise fut reçue de façon aussi positive qu’à Francfort. Voir pour l’exemple l’article de Laurence de la Baume « Mikhail Larionov, clé de l’art moderne » dans le Journal de Genève p. 22. D’autres articles allaient paraître dans la presse francophone aussi bien que de langue allemande : cf. Ciresica Ruz, « Mikhail Larionov ou la voie vers l’abstraction » in Journal de Genève, Georges F-Gianola, « Exposition Mikhail Larionov au musée Rath » in Le messager de Thonon, 1 avril 1988 F .J. « La peinture irradiée » in Le Matin, Lausanne, 7 avril 1988 Jeanmarie Hänggi, « Héroisme et aventure dans l’art » in Le Démocrate, Delemont, lundi 11 avril 1988, p. 24, Elisabeth Dumont-Gauye « Le rayon interrompu »(Exposition Mikhail Larionov) in L’Hebdo, Lausanne, 7 avril 1988, p. 93 et Christoph Vögele, « Farbige Träume der vierten Dimension » in Neue Züricher Zeitun.. Mon seul travail à l’époque fut la réalisation des accrochages.
Au début du mois d’avril 1988, quelques trois semaines après l’ouverture de l’exposition genevoise, je fus quelque peu surpris et, à dire vrai, agacé, par ce que j’ai eu tort de considérer comme une plaisanterie de mauvais goût : un appel téléphonique en début de soirée provenant d’une journaliste inconnue de Genève. Cette personne qui n’avait visiblement aucune connaissance en matière d’art et qui, me semble-t-il, ne prétendait même pas en avoir, me demandait si j’avais des commentaires à faire au sujet de l’authenticité des œuvres car : « suivant les affirmations de quelques experts désirant garder l’anonymat » (sic !), « toutes les œuvres de l’exposition seraient fausses »… Et ceci aurait été confirmé par des analyses chimiques des pigments qui seraient « postérieurs à 1941 ». J’ai eu tort de rejeter sans commentaire ces allégations, car comme j’allais l’apprendre peu de temps après, j’avais à faire face à une campagne de presse savamment orchestrée.
Conduite par des professionnels, cette campagne médiatique était lancée au même moment dans plusieurs publications suisses, à la télévision et principalement dans les pages du quotidien genevois « La Tribune de Genève »14Cette campagne débutait dans la « Tribune de Genève » le 8 avril 1998 par l’article d’Isabel Garcia-Gill « Des faux au Musée Rath ». Elle allait se poursuivre pendant plusieurs semaines.. Les « révélations » de « La Tribune de Genève » étaient immédiatement relayées par la presse allemande et américaine. Le professionnalisme de ce travail était attesté jusqu’au Japon : quelques semaines plus tard, le jour de mon arrivée (privée) à Tokyo, un journal local publiait en guise de bienvenue des informations concernant le « scandale Larionov ». Faut-il le rappeler, la veuve de Larionov était morte entretemps (le 14 septembre 1987), la voie d’une mise en doute de l’authenticité des œuvres se trouvait en conséquence ouverte. Comme j’allais l’apprendre quelques années plus tard, après la mort de la veuve, son domicile parisien a été « vidé » en toute impunité par François Daulte, qui fut l’instigateur principal (mais non unique) de la contestation de l’authenticité15Les faits ont été reconfirmés tout récemment par les investigations menées par la police française dans un autre dossier, où le nom de François Daulte est subitement apparu. La famille moscovite de la veuve de Larionov ayant été spoliée, les descendants de Mme Tomiline–Larionov allaient initier une action en justice à Paris. Le 12 mars 1998 les héritiers russes de Mme Tomiline-Larionov déposent au Tribunal de grande Instance de Paris une première plainte pénale « contre x » pour « abus de confiance et escroquerie » (détournement d’héritage). F. Daulte y occupe une place de choix .cf. François Duret-Robert « Les mystères de la successions Larionov », Le Figaro du 12 juillet 2002, p. 22 et « My rabotali, chtob’ ostavit’ vsë rodine » (Nous avons travaillé pour laisser tout à la patrie) in Moskovskie Novosti (Les Nouvelles de Moscou), n° 43 , Moscou le 27 octobre 1996, p. 20 (l’article est consacré au détournement de l’héritage).
Les recherches à ce sujet allaient apporter de bien surprenantes révélations. Voir aussi – « The Strange, Illegal Journey of the Larionov-Goncharova Archive » in Artnews, New York, March 1997, p. 80 – 85 et « Kirienko a donné 600 000 dollars aux avocats français pour des archives léguées à la Russie » par E.Vichniakova (en russe) in Kommersant Daily, Moscou du 22 juillet 1998, p. 10. L’article s’appuie sur une interview de l’avocat des héritiers de la veuve de Larionov. Il pose de nombreuses questions relatives au détournement de l’héritage Larionov et met ouvertement en cause l’action de F. Daulte. Plusieurs autres quotidiens russes allaient reprendre cet article en juillet 1998..
Alimenté par François Daulte, en son temps marchand attitré de la veuve du peintre, marchand suisse implanté financièrement dans la presse suisse de langue française, de même que par deux galeristes new yorkaises16Cf. Ingrid Hutton, lettre à Isabel Garcia-Gill, journaliste de la « Tribune de Genève », datée du 5 avril 1989 et publiée dans ce journal. Le même journal citait aussi la galeriste Rachel Adler. D’autres acteurs du marché travaillant avec Daulte étaient également actifs, mais se tenaient prudemment dans l’ombre (voir le début de la note). Une seule historienne d’art franco-américaine se fit prendre au mythe des « faux pigments » et fit des déclarations à l’appui de la thèse de la journaliste genevoise., qui comme j’allais l’apprendre par la suite avait auparavant essayé d’acheter sans succès la majorité des pastels apparus sur le marché européen, la campagne de presse se développait avec une violence propre à ce type d’entreprise ; tous les amalgames étaient utilisés, y compris ceux d’ « agent du KGB », « propriétaire occulte » , « commanditaire des œuvres » et autres dont je fus gratifié17Voir l’interview de F. Daulte au journal L’Hebdo, Lausanne : « L’affaire Larionov, le panier de crabes » par Elizabeth Dumont-Gauye le 28 avril 1988, de même que l’article de « synthèse » de la Tribune de Genève, 30 avril 1988, dont une partie fut reprise par le mensuel allemand Art, Hamburg, juillet 1988, p. 12-13.. Tout au long de cette période d’attaques aussi violentes que fantaisistes, les pages de la presse restaient fermées devant moi et ce fut ainsi jusqu’au milieu des années quatre-vingt-dix, sauf rares exceptions de « droit de réponse », résultant chaque fois de mes actions en justice18Seuls deux articles allaient se détacher du troupeau médiatique. L’article de Faber-Castel « Fälschungen » : « Lynchjustiz in Sachen Kunst ? » in Finanz und Wirtschaft, Zurich du 14 mars1990 fut le seul article positif de cette période(1988) et qui osa se démarquer de la tendance aveuglement accusatrice. Dans un article dont le titre est à lui seul éloquent, le critique d’art zurichois tirait des conclusions nuancées des différents arguments chimiques.
En 1995, Pijac, journaliste d’investigation réputé, publia le premier article objectif où il présentait à égalité les arguments des deux parties : François Daulte et moi-même. Cf. « L’affaire Larionov rebondit : on devait enfin savoir la vérité », in 24 heures, Lausanne du 20/12/1995, p. 47. Suite à cette publication, Daulte devait se retirer totalement des actions médiatiques et juridiques engagées à Genève..
Faute de spécialistes, le marché fait la loi
La contestation de l’authenticité des œuvres bénéficiait d’un vide total du point de vue de l’histoire de l’art. Terrorisés par les révélations fallacieuses de la presse, les historiens d’art ou assimilés qui avaient, au départ, tous suivi mon attribution disparaissaient soudainement du devant de la scène. Aucun parmi eux n’eut le courage d’affirmer une opinion personnelle. Pétrifiés par le spectre du faux, aucun d’eux ne s’adressa à moi, fut-ce en privé pour demander mon commentaire. Ainsi lors d’un colloque organisée à Paris en 1995, réunion muséale aux ambitions scientifiques au cours de laquelle François Daulte fut reçu en persona grata, l’historien d’art belge qui fut chargé à présenter de façon apparemment improvisée l ‘« affaire Larionov », résuma-t-il son intervention à la seule citation de quelques extraits d’articles de presse (mais sans mentionner aucune de mes réponses). N’étant pas invité à la tribune, je fus obligé de l’interrompre pour faire connaître au moins quelques éléments du dossier.
Réduites à la seule dimension d’un « fait divers », la presse véhiculait, avec un appétit non dissimulé pour le scandale, les seules accusations formulées par le commerce de l’art (principalement François Daulte qui ne se privait pas de donner des interviews accusatoires). Spécialiste quelque peu contesté de l’impressionnisme français (la diffusion de son « Catalogue raisonné » de Renoir avait été légalement interdite en France par les descendants du peintre), à Genève, Daulte s’érigeait soudainement en expert de Larionov, titre largement usurpé et qui ne s’appuyait que sur quelques articles superficiels et introductions aux catalogues d’expositions commerciales.
Incapable de répondre à mes questions lors de la confrontation publique qu’il avait lui-même hourdie, (émission de la télévision Suisse Romande en date du 24 mai 1988) Daulte battait rapidement en retraite en disant à l’occasion ne pas avoir la prétention d’être un spécialiste de l’époque ni de l’école Russe, ce qu’il clamait par ailleurs de façon tonitruante dans ses déclarations à la presse helvétique et dans sa « dénonciation » envoyée à la justice genevoise à la date bien symbolique du 14 septembre 198719Date du premier anniversaire de la mort d’Alexandra Tomiline-Larionov, la veuve du peintre..
En cette « fin de règne » du régime soviétique, une contestation parallèle fut orchestrée à Moscou sous la forme d’une « lettre ouverte » par ce même François Daulte. Cette « lettre ouverte », paraissait dans l’hebdomadaire moscovite Sovetskaja kultura (La culture soviétique)20Cf. « Vystavka poddelok » (Une exposition de faux), lettre ouverte signée par les historiens d’art soviétiques Evgueny Kovtun, Gleb Pospelov et Dmitri Sarabianov paru dans Sovetskaja kul’tura (La culture soviétique), Moscou, le 18 juin 1988.. Contresignée par trois historiens d’art soviétiques, qui ne se gênaient pas d’avouer qu’ils n’avaient pas vu l’exposition, cette lettre condamnait néanmoins l’ensemble des œuvres. Les auteurs se déclaraient en même temps impuissants à juger ces œuvres… « faute d’avoir pu étudier suffisamment l’art de l’époque en question » (1907-1915) disaient-ils ouvertement.
Dépasser l’écran des pastels : signatures, iconographie et documentation
À court d’arguments stylistiques et plus précisément artistiques (historiques, littéraires et autres) l’accusation contre l’exposition s’appuyait sur la prétendue présence de certains pigments (le fameux blanc de Titane, Ti02) dont la production commerciale serait postérieure à la datation que j’avais proposée pour les œuvres. Les accusatrices américaines lançaient même la date 1941 pour la commercialisation du rutil (le TiO2)… ce aux États-Unis, tandis que les brevets européens situaient formellement l’apparition de ce pigment quelques vingt ans plus tôt (à partir de 1917, brevet du chimiste norvégien Farup) et sa commercialisation au plus tard en 1920-1922 (mise sur le marché par la maison française Lefranc Bourgeois et par l’anglaise Winston & Newton), sans parler de la production russe qui ne fut évoquée à aucun moment. Par ailleurs, le fait que l’exposition ait été composée d’environ soixante pour cent de pastels, le reste étant des gouaches, aquarelles et encres de Chine ne fut jamais pris en compte. Y figuraient de nombreuses scènes de ville et des portraits, sujets identifiables, sinon se prêtant à l’étude en dehors de la seule question des pigments. Il était manifeste que c’était une condamnation aussi univoque qu’indiscutable que les accusateurs de l’exposition visaient à tout prix…
Toutes les œuvres étaient signées ou au moins monogrammées. Plusieurs encres de Chine comportaient des inscriptions. Il aurait été donc logique de vérifier la véracité des signatures et des inscriptions, ce que je n’ai pas tardé de faire. L’experte parisienne21Cette expertise fut réalisée par Éliane Petit de Mirbeck, graphologue auprès de la Cour d’Appel de Paris. Par un écrit daté du 10 avril 1989, elle confirmait l’authenticité des signatures du peintre qui figurent sur les œuvres exposées à Genève et à Francfort. que j’ai contactée à cet effet a confirmé que les écritures étaient bien celles de Larionov22Ma demande d’une expertise graphologique ne reçut aucune réponse du Tribunal de Genève. Il en fut de même pour les analyses du papier qui se sont révélé concluantes. Elles ont été réalisées à Grenoble par le laboratoire du CNRS – service central d’analyses et d’assistance technique de la papeterie, cf. Rapport n° 11986 de 6 février 1989.. S’agissant d’inscription cyrilliques, vingt ans plus tard j’initiais une nouvelle expertise à Moscou : le résultat de cette étude, bien plus riche et détaillée, confirmait définitivement que les signatures étaient bien celles de Larionov23Cette expertise graphologique a été réalisée en 2009 à Moscou par le « Centre d’expertises juridiques » (agréé auprès de la Haute Cour de Justice). Les experts ont comparé les signatures et les inscriptions de l’exposition contestée de 1988 avec un large éventail de signatures qui figurent sur des œuvres conservées dans les collections publiques et dans les Archives d’État de la Littérature et de l’Art de Moscou (RGALI, M). Ils ont conclu à l’authenticité des signatures, figurant sur les œuvres de l’exposition 1987-1988. Cf. « Zakljuchenie » (Conclusion) n° 664/SKE en date du 28 décembre 2009.. Ces arguments comme bien d’autres que je n’ai pas manqué d’apporter en son temps à la justice genevoise, furent noyés dans le tintamarre d’un dénigrement des œuvres, programmé à l’avance.
Centre d’expertises juridiques (agréé auprès de la Haute Cour de Justice), Rapport d’expertise graphologique réalisée en 2009 à Moscou
Des recherches iconographiques et tout simplement historiques que j’ai conduites par la suite à Moscou, m’ont permis d’identifier les lieux de plusieurs scènes (vues du Kremlin, cour de l’immeuble de l’impasse Trehpudnyj où Gontcharova et Larionov avaient leurs ateliers) et des personnages autres que ceux figurants sur les œuvres de l’exposition, tandis que ceux qui figuraient dans le catalogue de l’exposition étaient issus de l’entourage direct de Larionov : sa compagne Gontcharova, Tatlin, le peintre et compositeur Matiouchine, David Burljuk, les poètes Maiakovski, Kroutchenykh, Khlebnikov.
Mes collègues moscovites Rudolf Douganov et Alexandre Nikitaev m’aidèrent à en identifier d’autres. Une partie de ces renseignements ainsi que des illustrations ont été publiées par eux à Moscou dès le milieu des années 199024Deux portraits inclus dans l’exposition de 1987 ont été publiés à Moscou en 1995 dans le livre Alexei Kruchenykh. Our arrival. From the History of Russian Futurism, sous la red. de R. Douganov éditions RA, ill. 5, p. 125 (portrait de David Bourliouk, cat. d’exp. 1987 n° 86, ill. p. 138) et ill. 38, p. 143 (portrait d’Alexei Krutchenykh, cat. d’exp. 1987 n° 90, ill. p. 139).
Une autre publication a eu lieu en 2016 également à Moscou dans le livre de A. Loukanova cf. Alla Lukanova, Natalia Goncharova. 1881-1962, Moscou, éd. Iskusstvo-XXI vek. 2017 ill. p.194 (Mayakovsky i Burluik).. Grâce à leurs connaissances historiques je suis même parvenu à identifier certains lieux et à déterminer les circonstances dans lesquels Larionov avait réalisé une bonne partie des portraits. Certaines figures, présentes dans les portraits indiquaient que Larionov, de même que les amis futuristes du peintre se rendaient souvent dans la résidence estudiantine des frères Liapine, située dans la rue Bolshaïa Dmitrovka. Ils fréquentaient aussi celle du conservatoire de musique (dite « Romanovka ») où était installée la sœur cadette des frères Bourliouk. Ces renseignements ont été par la suite confirmés indirectement par le reste des archives de Vinogradov25Cf. E. Ovsiannikova : « Larionov i Gontcharova. Materialy iz arkhiva N. D. Vinogradova » (Larionov et Gontcharova – Documents des archives de Vinogradov) in anthologie Larionov et Gontcharova, Moscou 2001, p. 55-72. Voir en particulier les pages 67-70 où sont citées les notes de Vinogradov, relatives à l’atelier de Larionov et pour commencer sa visite du 12 septembre 1919 à cet atelier.
Cf. aussi du même auteur : « Arhitektor N. D. Vinogradov – Zapiski revoljutsionnogo vremeni (L’architecte D. N. Vinogradov, notes de l’époque révolutionnaire) in Iskusstvo 1987, n° 11, p. 34-43 et « Pervyj proletarskij muzej » (Le premier musée prolétarien – à Moscou) in anthologie Panorama iskusstv 7, Moscou 1984, p. 268-283. Le premier musée prolétarien fut formé à partir du 8 nov. 1918 (première exposition préfigurant ce musée eut lieu dans les salons de la rue Bol’shaja Dmitrovka, aujourd’hui rue Pouchkine n° 24). Il a existé jusqu’en 1924, Vinogradov a occupé les locaux ul. Shchuseva. , qui se trouvaient en la possession de ses héritiers moscovites. En d’autres termes la galerie des personnages que l’on avait devant les yeux était ni plus ni moins qu’une sorte de « livre d’or » du futurisme moscovite.
Les notes manuscrites de l’ancien propriétaire des œuvres figurant au dos de nombreuses petites lithographies de Larionov26Ces lithographies futuristes de Larionov faisaient partie des papiers conservés dans l’atelier. Elles furent utilisées par Vinogradov comme simples brouillons pour ses fiches architectoniques (voir les trois illustrations ci-dessous). indiquaient le peu de valeur artistique qu’il y attachait, car il les utilisait en tant que simples fiches pour ses travaux de bibliographie, ceci permettant par ailleurs de reconfirmer leur détenteur initial : Nikolaï Vinogradov.
L’historique des pigments : analyses et documentation d’époque
Quant aux pigments incriminés, au départ de la campagne de presse (le 8 avril 1988) le blanc de titane (TiO2) fut érigé en étendard de la contestation. Lorsque j’ai eu l’occasion de m’exprimer publiquement à ce sujet, en émettant des doutes fondés sur des références historiques et en particulier russes (sujet que l’on avait soigneusement évité d’évoquer auparavant), ce pigment a soudainement disparu du discours accusateur pour être remplacé par le « Bleu de manganèse »27Voir l’article « définitif » (sic !) de La Tribune de Genève datée du 30 avril 1988 qui fonde son accusation sur la « présence » de ce pigment. Les analyses ordonnées en 1992 par le tribunal de Genève et réalisées par le prof. W. Stern de Bâle, l’expert choisi par ce tribunal confirmaient sans aucune ambiguïté que ce pigment ne se trouvait pas dans les pastels incriminés.
On ajoutera que le bleu de manganèse est un pigment très facile à détecter, ce en raison de la simplicité avec laquelle on identifie le manganèse, métal au poids spécifique parfaitement déterminé.. Or, le « Bleu de manganèse » existait bel et bien depuis le milieu du XIXème siècle !
Aucune référence fiable quant aux pigments utilisés par Larionov n’a été évoquée pour la simple raison que jusqu’alors personne n’avait étudié les pigments de ce peintre. Mis au pied du mur par la campagne de presse, aussi bien que par les injonctions légales que lui adressait mon avocat Maître Pierre Schifferli, le Musée d’Art et d’Histoire a annoncé plusieurs semaines après la fin de l’exposition, des résultats d’« analyses » que l’on prétendait avoir été « effectuées par son propre laboratoire »… Or, au cours des débats auprès du tribunal, il s’est avéré qu’il n’existait aucune trace matérielle de ces « analyses » ; elles n’avaient pas été « documentées », donc autant dire, qu’elles n’avaient tout simplement pas eu lieu28Voir les attendus du jugement contre La Tribune de Genève, daté du 23 septembre 1993, journal qui fondait son accusation sur la prétendue « présence » de ces pigments..
J’avais de mon côté fait procéder à titre privé, à des analyses sur des pastels de la même provenance. Elles m’ont permis d’identifier avec précision le pigment blanc utilisé par Larionov, il s’agissait d’un blanc de zinc, particularisé dans ce cas par une forte charge de Baryum (Ba). Ces analyses étaient diligentées auprès de plusieurs laboratoires du CNRS (Grenoble, Lyon, Cadarache, Nancy) par un chimiste indépendant. Leur synthèse a été effectuée par le laboratoire « Cara » d’Avignon (cf. rapport d’analyse daté du 19 avril 1989). Le tribunal de Genève ayant nommé un expert suisse, une confrontation a eu lieu le 17 novembre 1992. Des analyses complémentaires demandées par la suite ont reconfirmé les résultats de l’analyse du 19 avril 1989, c’est-à-dire l’absence du blanc de titane de synthèse dans les pigments des pastels incriminés. Par ailleurs, des analyses conduites par le Laboratoire des Musées de France (le laboratoire du Louvre à Paris) sur des œuvres de Larionov reçues à titre de dation par les Musées nationaux révélaient elles aussi en 1995 dans les mêmes termes le pigment blanc de Zinc à forte charge de Baryum (Ba) que l’on retrouvait dans les peintures de Larionov, œuvres reçues directement de l’héritage de la veuve et qui constituaient à ce titre une référence indiscutable29Cf. Jean-Paul Rioux, Geneviève Aitken et Alain Duval, « Matériaux et techniques des peintures de Nathalie S. Gontcharova et de Michel F. Larionov du Musée national d’art moderne » in Techne, Paris 1998, n° 8, p. 1732..
Poursuivant mes recherches historiques, je parvins à trouver au début des années 1990, des documents de la main de Larionov et de la même période (1911-12) où il nommait explicitement les produits du fabricant moscovite Dosekin… dont il recommandait l’utilisation à son ami Kandinsky30Cette documentation épistolaire fait partie des archives Kandinsky (coll. Münter-Eichner) conservées à la Städtische Galerie Lenbachhaus de Munich. Lors de ma première visite à ces archives elle était classée « non identifiée », car personne ne s’était occupé des manuscrits cyrilliques. À l’émission de télévision du 24 mai 1988, François Daulte exhibait de façon théâtrale une boîte de pastels français en indiquant qu’il s’agissait des pastels utilisés par Larionov (D’où les tenait-il par ailleurs ?).. Grâce à cette correspondance inédite je fermais ainsi la boucle des recherches historiques que la contestation vicieuse des œuvres m’a obligé à effectuer.
Calomniez, calomniez, il en restera toujours quelque chose…
Animé par la volonté de connaître et de faire connaître la vérité sur l’authenticité des œuvres et avec l’accord du directeur du musée, au terme de l’exposition, je faisais saisir par huissier l’ensemble des œuvres ayant composé cette exposition31Cette saisie fut réalisée en accord avec le directeur du Musée d’Art et d’Histoire de Genève le 19 mai 1988 par l’huissier Jean Staehli.. J’ai initié cette saisie pour deux raisons : premièrement, je ne voulais pas que pour quelques raisons que ce soit (affolement des propriétaires ou autre) les œuvres puissent disparaître. Deuxièmement, ayant pressenti des manipulations frauduleuses, j’avais peur que des mains criminelles puissent les toucher. Ma seule motivation était la protection et la sauvegarde des œuvres en vue d’assurer la démonstration de la vérité et non moins de protéger les œuvres de la destruction que François Daulte, ses collègues et la ville de Genève qui leur avait emboité le pas demandaient avec insistance. Ainsi, quand en vue de faire taire mes protestations, la ville de Genève se sentit obligée de déposer une plainte pénale pour me faire taire et que le Procureur demanda la saisie des œuvres, il eut la surprise de constater que cette saisie avait déjà eu lieu… à mon initiative.
Au cours d’une instruction que l’on faisait trainer à dessein en épuisant de façon méthodique tous les délais légaux, j’allais apprendre que les soi-disant analyses chimiques américaines qui avaient servi de tremplin d’attaque au marchandes new yorkaises, n’avaient d’analyse que le nom. Il s’agissait tout simplement d’une attestation de complaisance, alors que d’autres analyses réalisées auparavant par le même laboratoire de Chicago avaient conclu à l’authenticité des pigments32Réalisées par Walter McCrone, chimiste privé établi à Chicago : 23 juillet 1987, à la demande de Barry Friedman Ltd., New York., l’analyse, effectuée par ce laboratoire est positive et authentifie les œuvres. McCrone conclut : » There is little doubt in my mind that the two pieces are contemporary, probably from the same studio and dated early in this century. » Dans un autre écrit, envoyé par McCrone le 30 mars 1988 le même chimiste se contredisait… Une autre « analyse » (de complaisance) fut réalisée « à titre privé » par la chimiste new-yorkaise Eugenia Ordonez, technicienne qui se disait affiliée au Museum of Modern Art de New York. Contactée à plusieurs reprises par le professeur W. Stern l’expert nommé par le tribunal de Genève, l’analyste américaine n’a jamais répondu.. L’instruction a par ailleurs été émaillée de façon permanente des documents fallacieux, fausses lettres et fausses attestations, jusqu’à un faux dossier « criminel » que l’on fit atterrir dans la boîte à lettres de l’Interpol, et de là, sur le bureau du juge d’instruction genevois. Cette extravagance m’a conduit à saisir en France la Commission « Informatique et liberté », démarche qui allait m’apporter la confirmation de mes suppositions33J’ai introduit à Paris en mai 1994 une « action d’information » auprès de la CNIL (Commission Nationale Informatique et Libertés). Suite à une enquête auprès de divers services de la Police Nationale, il s’est avéré que le dossier de la Police Nationale ne contient aucune trace des pièces transmises à Genève par la voie administrative (Action close le 24 octobre 1994).. Il serait fastidieux d’énumérer les faux journalistes qui me furent envoyés et les fausses lettres d’insultes qui furent envoyées en mon nom. On alla jusqu’à m’envoyer une équipe de la télévision suisse pour m’interviewer. Tout en ayant été annoncée par la presse genevoise pour le début septembre 1988, l’émission fut déprogrammée au dernier moment…34La station de télévision « Suisse romande » de Genève a préparé durant l’été 1988 une émission consacrée à l’ « Affaire Larionov ». Une équipe de quatre personnes s’est déplacée à Paris en juin 1988 pour m’interviewer. Suite à la demande de mon avocat de visionner les déclarations qui me seraient attribuées avant leur mise à l’antenne, l’émission – déjà annoncée dans les programmes publics – a été tout simplement déprogrammée en dernière minute sans aucune explication.. Une fois de plus je n’ai pas eu la possibilité de m’exprimer publiquement.
De nombreux articles circulaient d’un journal à l’autre et continuent à ce jour à alimenter périodiquement des attaques d’arrière garde35Alimentées probablement par les mêmes sources, la revue américaine Artnews est un organe de la presse qui reprend périodiquement ces attaques.. Fait rarissime en Suisse, je réussis même à faire condamner en 1993 le journal « La Tribune de Genève » pour des propos diffamatoires. Chaque « droit de réponse » fut obtenu au pris d’actions en justice. Ironie de l’histoire : la journaliste genevoise qui s’est laissée piéger par ce « sujet à succès » allait recevoir pour ses reportages bombastiques un prix de « meilleur reportage suisse » pour l’année 1988…
Le 10 novembre 1995 le tribunal de Genève m’attribuant finalement un « non-lieu ». Dès 1995 un des signataires de l’infamante « lettre ouverte » de 1988 allait revenir sur son opinion et acceptait avec quelques réserves l’authenticité des œuvres36Cf. Pospelov, Gleb, « Falshivye raboty : smertnaja kazn’ ili pozhiznennoe zakljuchenie » (Les faux : condamnation à mort ou emprisonnement à vie ?) in Kommersant Daily, Moscou, le 26 décembre 1995, et une autre interview de Gleb Pospelov réalisée à Moscou par Nina Maharachvili, parue dans La pensée russe n° 4296, Paris 9-15 décembre 1999, p. 18.. D’autres historiens d’art allaient le suivre timidement, la majorité attendant toujours quelque confirmation officielle pour se ranger dans le camp de l’opinion autorisée… L’affaire pouvait sembler arrivée à bon port quand la ville de Genève déposait sans tarder une nouvelle plainte pénale cette fois-ci contre les seules œuvres37La « Requête en confiscation et destruction » des œuvres fut introduite par le Procureur de la République et du Canton de Genève le 23 novembre 1995.. On demandait, une fois de plus, la destruction pure et simple des œuvres ayant constitué l’exposition.
Il s’en ait suivi une deuxième bataille juridique dans laquelle je me suis porté partie civile en défense des œuvres contre la ville de Genève38En 1996, la ville de Genève allait être déboutée de cette action. qui continuait à réclamer la destruction des « faux ». Au terme de plusieurs années de procédures, la justice genevoise est arrivée en l’an 2000 à un compromis typiquement suisse : « ni pour ni contre, mais juste au contraire » : le tribunal permettait la restitution des œuvres à leurs propriétaires à la condition que ces œuvres soient estampillées au dos avec un cachet attestant de leur « fausseté » et indiquant leur inclusion dans l’exposition de 1988. Ce cachet39Mettant fin au séquestre, ce cachet fut apposé sur les œuvres en mars 2002 dans les locaux du Musée d’Art et d’Histoire de Genève. ubuesque constitue aujourd’hui une preuve fort originale du rôle historique que ces œuvres ont joué dans la connaissance moderne de l’œuvre de Larionov et dans celle du début de l’art abstrait, sujet qui comme il s’est avéré rencontre toujours des résistances. On conclurait que l’histoire de l’art ne se fait pas dans le labyrinthe juridique de procédures interminables et encore moins dans les approximations fantaisistes des quotidiens à grand tirage. Quant à l’avenir de cette partie essentielle de l’œuvre de Mikhaïl Larionov il est maintenant, de nouveau ouvert pour les salles d’exposition. Il n’attend qu’à être pris en main par les historiens de l’art : c’est le but de ce site internet.
Post-Scriptum
… ainsi écrit-on l’histoire.
Au début de l’année 1997, les éditions parisiennes « La bibliothèque des arts », appartenant de facto à F. Daulte, publiaient François Daulte – Entretiens avec Frank Bridel, plaquette hagiographique destinée à rehausser la réputation de François Daulte. Là, il est question de ses nombreux « exploits » d’historien d’art, connaisseur et expert, mais à aucun moment le sujet de Larionov n’est mentionné. On conclurait que le sujet avait changé de registre…
Le 18 avril 1998, François Daulte mourait à Lausanne. Plusieurs articles fort élogieux furent publiés par la presse genevoise. Peu après allait éclater le scandale de l’héritage d’Anne-Marie Rouart (morte à Paris en décembre 1993) : vingt-quatre tableaux qui avaient auparavant « disparus » de l’inventaire d’une des héritières de Manet furent « découverts » dans les coffres suisses de François Daulte. Ces œuvres ont été par la suite restituées à l’Institut de France, institution à laquelle elles étaient destinées dans le testament Rouart40« Où sont passé les trois Manet ? » Le Figaro du 18 avril 1997. L’affaire de cet héritage détourné a été reprise par d’autres journaux dont : The Art Newspaper n° 100 de février 2000, 24 Heures, Lausanne du 2 juillet 2000, Le Figaro du 16 juin 2000 Libération du 29 juin 2000. Voir la suite dans J.M. Tasset « Coup de théâtre dans la succession Rouart. Des Degas, Manet, Corot retrouvés » (y compris la 1ère page). Le Figaro du 7 décembre 1999, p. 34 et page 1. La nouvelle fera le tour de la presse française, suisse (« L’étrange silence de François Daulte » in 24 heures, Genève le 1-2 juillet 2000) et mondiale (cf. The Times du 8 décembre 1999, The Art Newspaper n° 100, Londres, February 2000). Cette affaire allait connaître à l’époque un dénouement par la remise des tableaux à l’Institut de France, c’est-à-dire au Musée Marmottant. Voir Le Figaro du 16 juin 2000 où les faits ont été présentés sous le titre « Scandale – Succession Rouart : le dénouement » (p. 28). La presse française repris dans son ensemble les révélations du Figaro (cf. par exemple Libération du 29 juin 2000).
Tout récemment le scandale des œuvres « disparues » allait rebondir faisant venir de nouveau à la lumière du jour le nom de François Daulte, cf. « Le trésor sulfureux des Wildenstein », Le Point, n° 2003, Paris le 3 février 2011, p. 81-82 et Harry Bellet, « La police a saisi des œuvres disparues ou volées à l’Institut Wildenstein », Le Monde du 2 février 2011 et Béatrice Rochebouet « Sur la piste des Manets disparus » in Le Figaro du 10 février 2011, p. 27-28 et Yves Rouart « Le tableau de ma tante dans le coffre des Wildenstein ! » (interview avec) in Point de vue n° 3265, Paris, 16 février 2011, p. 30-32..
En suivant fidèlement la ligne diffamatoire tracée par François Daulte, le Musée d’Art et d’histoire de Genève et en particulier son directeur Cäsar Menz, qui en 1994 a remplacé Claude Lapaire, s’est rangé dans le camp de l’accusation aveugle et non moins arrogante et n’a jamais répondu à mes lettres ouvertes de 1995. Sa gouvernance qualifiée d’ « arbitraire » et même « féodale » par la presse locale a conduit à la démission du directeur en 2009, car son action a été jugée un « échec » et que celle-ci a été « désavouée » par un « audit dévastateur »41Voir l’article « Musées de Genève : un audit dévastateur » dans Le Temps, Genève le 8 mai 2009 et aussi La Tribune de Genève du même 8 mai 2009.. Je conclurais en guise de consolation que tôt ou tard la Dame Histoire se charge de faire le ménage…
Quant à la plainte des héritiers d’Alexandra Tomiline-Larionov, elle s’enlisa une fois de plus dans des procédures juridiques compliquées et resta par la suite suspendue en raison de la mort des neveux de la veuve. Le dépôt de cette plainte à Paris eut néanmoins un résultat inattendu… à Moscou, l’annulation en 1997 d’un projet d’exposition muséale où figurait un bon nombre d’œuvres, « disparues » de la succession parisienne.
- 1Les archives soviétiques de même que celles qui se trouvaient aux mains de la veuve parisienne de l’artiste restaient pratiquement inaccessibles. À l’époque, c’était d’ailleurs le sort d’une grande partie de la documentation concernant l’avant-garde russe, domaine qui depuis la chute du mur de Berlin a connu un essor sans précédant. En raison de l’état de santé de la veuve de l’artiste et en raison de sa dépendance de son marchand François Daulte cette documentation, disparue depuis la mort de Mme Alexandra Tomiline-Larionov manque cruellement aux chercheurs. Cette situation est bien relatée dans la correspondance que Mme Tomiline-Larionov a entretenue avec sa sœur cadette Xenia. J’ai pu accéder à cette documentation moscovite grâce au travail d’Aleksander Reijevski, avocat russe de la famille de Mme Alexandra Tomiline-Larionov.
- 2Je fais référence à une lettre de la sœur de l’artiste – Alexandra Larionov, envoyée le 9 juillet 1919 à la Commission moscovite pour la protection des monuments et des œuvres d’art : elle faisait appel pour la protection de l’atelier de Larionov et celui de Gontcharova, menacés des pillages (archives RGALI,M- fond 680, IZO). Les effets de cette lettre sont attestés dans les carnets de Vinogradov, dont des extraits ont été publiés en 2001. Cf. bibl. Ovsjannikova 2001 (cité plus loin). Pourtant les carnets sont bien plus riches. Les péripéties de l’atelier de Larionov y figurent à plusieurs autres endroits que ceux mentionnés par Ovsjannikova et en particulier aux années 1922-1924. Malheureusement j’ai eu un accès très fragmentaire à ces carnets qui mériteraient une étude autrement plus systématique.
- 3A. E. Kovalëv, Mikhail Larionov v Rossii – 1881-1915 g.g. (Mikhail Larionov en Russie, les années 1881-1915) Moscou 2005, 622 pages (Éd. posthume) et 2ème partie du livre – anthologie de documents p. 323 et ss.
- 4Cf. Ovsiannikova, E., « Larionov i Gontcharova. Materialy iz arhiva N. D. Vinogradova (Larionov et Gontcharova. Documents des archives de Vinogradov) in anthologie Larionov et Gontcharova. Issledovanija i publikacjj, Moscou 2001, p. 55 – 72. Dans la même publication, on trouve plusieurs lettres de Larionov, dont celle à l’académicien P. S. Kogan (le 12 février 1925) relatives aux œuvres sur papier, laissées à Moscou où le nom de Vinogradov est clairement indiqué.
- 5Dans les carnets personnels de Vinogradov (coll. privée Moscou) on trouve le témoignage explicite de la dégradation dramatique de la situation socio culturelle et du danger que les rapports avec l’émigration « blanche » représentaient à ce moment pour le propriétaire de pareils archives. Les contacts avec le Musée Maïakovski avaient pour résultât l’achat par ce musée d’un grand ensemble d’affiches « Rosta » que Vinogradov avait réussi à sauvegarder. Les conditions matérielles, exceptionnelles pour son milieu et son temps et qui lui permirent de garder les œuvres sont indiquées de façon sommaire dans l’article de Ovsiannikova, op. cit.2001.
- 6Ainsi, une lettre que j’envoyais quelques mois avant l’exposition de Francfort à François Daulte, le marchand attitré de la veuve de Larionov, est restée sans réponse, d’autres fournissaient à dessein des informations erronées…
- 7Michail Larionov : la voie vers l’abstraction. Der Weg in die Abstraktion. Catalogue bilingue par A. Nakov (commissaire de l’exposition).
Présentations :
a) Schirn Kunsthalle, Francfort, du 9 avril au 24 mai 1987.
b) Pinacoteca di Bologna, Palazzo Pepoli, Bologne, du 4 septembre au 26 octobre 1987.
c) Musée d’Art et d’Histoire, salles du Musée Rath, Genève, du 10 mars au 24 avril 1988. - 8Voir dans l’annexe bibliographique les articles ayant commenté l’exposition de Francfort au cours de l’année qui a suivi son ouverture, c’est-à-dire avant le lancement du « scandale » genevois, avant avril 1988.
Bibliographie de l’exposition - 9• Galerie Schlegl, Zurich, du 22 mars au 16 mai 1987. Catalogue illustré avec introduction par Philipp Ingold, slaviste zurichois.
• Galerie Aronowitsch, Stockholm, nov.-déc. 1987. Catalogue illustré (grand format) comprenant des textes de J. Bowlt, slaviste et universitaire américain et A. Parton, historien d’art anglais, auteur d’une thèse de doctorat sur Larionov. Cette thèse sera publiée en 1993 sous le titre Mikhail Larionov and the Russian Avant-garde, Thames & Hudson, Londres.
• A New Spirit, Galerie Barry Friedman Ltd., New York, nov. 1987, exposition collective incluant entre autres plusieurs pastels de Larionov de la même provenance. Catalogue illustré avec introduction de J. Bowlt.
• Trois pastels de la coll. R. Boulée, Paris sont inclus dans l’exposition 1912 – Brake up of Tradition/Traditions et ruptures, Winnipeg Art Gallery,Winnipeg, Canada, du 7 août au 4 octobre 1987, organisée par l’historienne d’art canadienne Louise d’Argencourt (Les œuvres sont commentées et illustrées dans le catalogue : cat. n° 54 et 163, ill. p. 133 et cat. n° 162, ill. p. 130).
• Exposition d’encres de Chine organisée à Montréal, été 1987, par la galerie Geerbrandt. En guise de catalogue fut publié un dépliant illustré. - 10Ceci eut lieu le 14 mars 1995 au cours d’une confrontation ordonnée par la juge genevoise.
- 11La réception fut aussi enthousiaste qu’à Francfort. Je citerais pour l’exemple l’article de Claudio Spadoni, « Futurista dell’Est – L’avanguardia di Larionov a Bologna » in Carlino Terza, Bologna le 19 octobre 1987.
- 12Élue au Japon une des « dix meilleures expositions de l’année », cette exposition fut présentée au printemps 1989 au Centre Reina Sofia de Madrid.
- 13Au début l’exposition genevoise fut reçue de façon aussi positive qu’à Francfort. Voir pour l’exemple l’article de Laurence de la Baume « Mikhail Larionov, clé de l’art moderne » dans le Journal de Genève p. 22. D’autres articles allaient paraître dans la presse francophone aussi bien que de langue allemande : cf. Ciresica Ruz, « Mikhail Larionov ou la voie vers l’abstraction » in Journal de Genève, Georges F-Gianola, « Exposition Mikhail Larionov au musée Rath » in Le messager de Thonon, 1 avril 1988 F .J. « La peinture irradiée » in Le Matin, Lausanne, 7 avril 1988 Jeanmarie Hänggi, « Héroisme et aventure dans l’art » in Le Démocrate, Delemont, lundi 11 avril 1988, p. 24, Elisabeth Dumont-Gauye « Le rayon interrompu »(Exposition Mikhail Larionov) in L’Hebdo, Lausanne, 7 avril 1988, p. 93 et Christoph Vögele, « Farbige Träume der vierten Dimension » in Neue Züricher Zeitun.
- 14Cette campagne débutait dans la « Tribune de Genève » le 8 avril 1998 par l’article d’Isabel Garcia-Gill « Des faux au Musée Rath ». Elle allait se poursuivre pendant plusieurs semaines.
- 15Les faits ont été reconfirmés tout récemment par les investigations menées par la police française dans un autre dossier, où le nom de François Daulte est subitement apparu. La famille moscovite de la veuve de Larionov ayant été spoliée, les descendants de Mme Tomiline–Larionov allaient initier une action en justice à Paris. Le 12 mars 1998 les héritiers russes de Mme Tomiline-Larionov déposent au Tribunal de grande Instance de Paris une première plainte pénale « contre x » pour « abus de confiance et escroquerie » (détournement d’héritage). F. Daulte y occupe une place de choix .cf. François Duret-Robert « Les mystères de la successions Larionov », Le Figaro du 12 juillet 2002, p. 22 et « My rabotali, chtob’ ostavit’ vsë rodine » (Nous avons travaillé pour laisser tout à la patrie) in Moskovskie Novosti (Les Nouvelles de Moscou), n° 43 , Moscou le 27 octobre 1996, p. 20 (l’article est consacré au détournement de l’héritage).
Les recherches à ce sujet allaient apporter de bien surprenantes révélations. Voir aussi – « The Strange, Illegal Journey of the Larionov-Goncharova Archive » in Artnews, New York, March 1997, p. 80 – 85 et « Kirienko a donné 600 000 dollars aux avocats français pour des archives léguées à la Russie » par E.Vichniakova (en russe) in Kommersant Daily, Moscou du 22 juillet 1998, p. 10. L’article s’appuie sur une interview de l’avocat des héritiers de la veuve de Larionov. Il pose de nombreuses questions relatives au détournement de l’héritage Larionov et met ouvertement en cause l’action de F. Daulte. Plusieurs autres quotidiens russes allaient reprendre cet article en juillet 1998. - 16Cf. Ingrid Hutton, lettre à Isabel Garcia-Gill, journaliste de la « Tribune de Genève », datée du 5 avril 1989 et publiée dans ce journal. Le même journal citait aussi la galeriste Rachel Adler. D’autres acteurs du marché travaillant avec Daulte étaient également actifs, mais se tenaient prudemment dans l’ombre (voir le début de la note). Une seule historienne d’art franco-américaine se fit prendre au mythe des « faux pigments » et fit des déclarations à l’appui de la thèse de la journaliste genevoise.
- 17Voir l’interview de F. Daulte au journal L’Hebdo, Lausanne : « L’affaire Larionov, le panier de crabes » par Elizabeth Dumont-Gauye le 28 avril 1988, de même que l’article de « synthèse » de la Tribune de Genève, 30 avril 1988, dont une partie fut reprise par le mensuel allemand Art, Hamburg, juillet 1988, p. 12-13.
- 18Seuls deux articles allaient se détacher du troupeau médiatique. L’article de Faber-Castel « Fälschungen » : « Lynchjustiz in Sachen Kunst ? » in Finanz und Wirtschaft, Zurich du 14 mars1990 fut le seul article positif de cette période(1988) et qui osa se démarquer de la tendance aveuglement accusatrice. Dans un article dont le titre est à lui seul éloquent, le critique d’art zurichois tirait des conclusions nuancées des différents arguments chimiques.
En 1995, Pijac, journaliste d’investigation réputé, publia le premier article objectif où il présentait à égalité les arguments des deux parties : François Daulte et moi-même. Cf. « L’affaire Larionov rebondit : on devait enfin savoir la vérité », in 24 heures, Lausanne du 20/12/1995, p. 47. Suite à cette publication, Daulte devait se retirer totalement des actions médiatiques et juridiques engagées à Genève. - 19Date du premier anniversaire de la mort d’Alexandra Tomiline-Larionov, la veuve du peintre.
- 20Cf. « Vystavka poddelok » (Une exposition de faux), lettre ouverte signée par les historiens d’art soviétiques Evgueny Kovtun, Gleb Pospelov et Dmitri Sarabianov paru dans Sovetskaja kul’tura (La culture soviétique), Moscou, le 18 juin 1988.
- 21Cette expertise fut réalisée par Éliane Petit de Mirbeck, graphologue auprès de la Cour d’Appel de Paris. Par un écrit daté du 10 avril 1989, elle confirmait l’authenticité des signatures du peintre qui figurent sur les œuvres exposées à Genève et à Francfort.
- 22Ma demande d’une expertise graphologique ne reçut aucune réponse du Tribunal de Genève. Il en fut de même pour les analyses du papier qui se sont révélé concluantes. Elles ont été réalisées à Grenoble par le laboratoire du CNRS – service central d’analyses et d’assistance technique de la papeterie, cf. Rapport n° 11986 de 6 février 1989.
- 23Cette expertise graphologique a été réalisée en 2009 à Moscou par le « Centre d’expertises juridiques » (agréé auprès de la Haute Cour de Justice). Les experts ont comparé les signatures et les inscriptions de l’exposition contestée de 1988 avec un large éventail de signatures qui figurent sur des œuvres conservées dans les collections publiques et dans les Archives d’État de la Littérature et de l’Art de Moscou (RGALI, M). Ils ont conclu à l’authenticité des signatures, figurant sur les œuvres de l’exposition 1987-1988. Cf. « Zakljuchenie » (Conclusion) n° 664/SKE en date du 28 décembre 2009.
- 24Deux portraits inclus dans l’exposition de 1987 ont été publiés à Moscou en 1995 dans le livre Alexei Kruchenykh. Our arrival. From the History of Russian Futurism, sous la red. de R. Douganov éditions RA, ill. 5, p. 125 (portrait de David Bourliouk, cat. d’exp. 1987 n° 86, ill. p. 138) et ill. 38, p. 143 (portrait d’Alexei Krutchenykh, cat. d’exp. 1987 n° 90, ill. p. 139).
Une autre publication a eu lieu en 2016 également à Moscou dans le livre de A. Loukanova cf. Alla Lukanova, Natalia Goncharova. 1881-1962, Moscou, éd. Iskusstvo-XXI vek. 2017 ill. p.194 (Mayakovsky i Burluik). - 25Cf. E. Ovsiannikova : « Larionov i Gontcharova. Materialy iz arkhiva N. D. Vinogradova » (Larionov et Gontcharova – Documents des archives de Vinogradov) in anthologie Larionov et Gontcharova, Moscou 2001, p. 55-72. Voir en particulier les pages 67-70 où sont citées les notes de Vinogradov, relatives à l’atelier de Larionov et pour commencer sa visite du 12 septembre 1919 à cet atelier.
Cf. aussi du même auteur : « Arhitektor N. D. Vinogradov – Zapiski revoljutsionnogo vremeni (L’architecte D. N. Vinogradov, notes de l’époque révolutionnaire) in Iskusstvo 1987, n° 11, p. 34-43 et « Pervyj proletarskij muzej » (Le premier musée prolétarien – à Moscou) in anthologie Panorama iskusstv 7, Moscou 1984, p. 268-283. Le premier musée prolétarien fut formé à partir du 8 nov. 1918 (première exposition préfigurant ce musée eut lieu dans les salons de la rue Bol’shaja Dmitrovka, aujourd’hui rue Pouchkine n° 24). Il a existé jusqu’en 1924, Vinogradov a occupé les locaux ul. Shchuseva. - 26Ces lithographies futuristes de Larionov faisaient partie des papiers conservés dans l’atelier. Elles furent utilisées par Vinogradov comme simples brouillons pour ses fiches architectoniques (voir les trois illustrations ci-dessous).
- 27Voir l’article « définitif » (sic !) de La Tribune de Genève datée du 30 avril 1988 qui fonde son accusation sur la « présence » de ce pigment. Les analyses ordonnées en 1992 par le tribunal de Genève et réalisées par le prof. W. Stern de Bâle, l’expert choisi par ce tribunal confirmaient sans aucune ambiguïté que ce pigment ne se trouvait pas dans les pastels incriminés.
On ajoutera que le bleu de manganèse est un pigment très facile à détecter, ce en raison de la simplicité avec laquelle on identifie le manganèse, métal au poids spécifique parfaitement déterminé. - 28Voir les attendus du jugement contre La Tribune de Genève, daté du 23 septembre 1993, journal qui fondait son accusation sur la prétendue « présence » de ces pigments.
- 29Cf. Jean-Paul Rioux, Geneviève Aitken et Alain Duval, « Matériaux et techniques des peintures de Nathalie S. Gontcharova et de Michel F. Larionov du Musée national d’art moderne » in Techne, Paris 1998, n° 8, p. 1732.
- 30Cette documentation épistolaire fait partie des archives Kandinsky (coll. Münter-Eichner) conservées à la Städtische Galerie Lenbachhaus de Munich. Lors de ma première visite à ces archives elle était classée « non identifiée », car personne ne s’était occupé des manuscrits cyrilliques. À l’émission de télévision du 24 mai 1988, François Daulte exhibait de façon théâtrale une boîte de pastels français en indiquant qu’il s’agissait des pastels utilisés par Larionov (D’où les tenait-il par ailleurs ?).
- 31Cette saisie fut réalisée en accord avec le directeur du Musée d’Art et d’Histoire de Genève le 19 mai 1988 par l’huissier Jean Staehli.
- 32Réalisées par Walter McCrone, chimiste privé établi à Chicago : 23 juillet 1987, à la demande de Barry Friedman Ltd., New York., l’analyse, effectuée par ce laboratoire est positive et authentifie les œuvres. McCrone conclut : » There is little doubt in my mind that the two pieces are contemporary, probably from the same studio and dated early in this century. » Dans un autre écrit, envoyé par McCrone le 30 mars 1988 le même chimiste se contredisait… Une autre « analyse » (de complaisance) fut réalisée « à titre privé » par la chimiste new-yorkaise Eugenia Ordonez, technicienne qui se disait affiliée au Museum of Modern Art de New York. Contactée à plusieurs reprises par le professeur W. Stern l’expert nommé par le tribunal de Genève, l’analyste américaine n’a jamais répondu.
- 33J’ai introduit à Paris en mai 1994 une « action d’information » auprès de la CNIL (Commission Nationale Informatique et Libertés). Suite à une enquête auprès de divers services de la Police Nationale, il s’est avéré que le dossier de la Police Nationale ne contient aucune trace des pièces transmises à Genève par la voie administrative (Action close le 24 octobre 1994).
- 34La station de télévision « Suisse romande » de Genève a préparé durant l’été 1988 une émission consacrée à l’ « Affaire Larionov ». Une équipe de quatre personnes s’est déplacée à Paris en juin 1988 pour m’interviewer. Suite à la demande de mon avocat de visionner les déclarations qui me seraient attribuées avant leur mise à l’antenne, l’émission – déjà annoncée dans les programmes publics – a été tout simplement déprogrammée en dernière minute sans aucune explication.
- 35Alimentées probablement par les mêmes sources, la revue américaine Artnews est un organe de la presse qui reprend périodiquement ces attaques.
- 36Cf. Pospelov, Gleb, « Falshivye raboty : smertnaja kazn’ ili pozhiznennoe zakljuchenie » (Les faux : condamnation à mort ou emprisonnement à vie ?) in Kommersant Daily, Moscou, le 26 décembre 1995, et une autre interview de Gleb Pospelov réalisée à Moscou par Nina Maharachvili, parue dans La pensée russe n° 4296, Paris 9-15 décembre 1999, p. 18.
- 37La « Requête en confiscation et destruction » des œuvres fut introduite par le Procureur de la République et du Canton de Genève le 23 novembre 1995.
- 38En 1996, la ville de Genève allait être déboutée de cette action.
- 39Mettant fin au séquestre, ce cachet fut apposé sur les œuvres en mars 2002 dans les locaux du Musée d’Art et d’Histoire de Genève.
- 40« Où sont passé les trois Manet ? » Le Figaro du 18 avril 1997. L’affaire de cet héritage détourné a été reprise par d’autres journaux dont : The Art Newspaper n° 100 de février 2000, 24 Heures, Lausanne du 2 juillet 2000, Le Figaro du 16 juin 2000 Libération du 29 juin 2000. Voir la suite dans J.M. Tasset « Coup de théâtre dans la succession Rouart. Des Degas, Manet, Corot retrouvés » (y compris la 1ère page). Le Figaro du 7 décembre 1999, p. 34 et page 1. La nouvelle fera le tour de la presse française, suisse (« L’étrange silence de François Daulte » in 24 heures, Genève le 1-2 juillet 2000) et mondiale (cf. The Times du 8 décembre 1999, The Art Newspaper n° 100, Londres, February 2000). Cette affaire allait connaître à l’époque un dénouement par la remise des tableaux à l’Institut de France, c’est-à-dire au Musée Marmottant. Voir Le Figaro du 16 juin 2000 où les faits ont été présentés sous le titre « Scandale – Succession Rouart : le dénouement » (p. 28). La presse française repris dans son ensemble les révélations du Figaro (cf. par exemple Libération du 29 juin 2000).
Tout récemment le scandale des œuvres « disparues » allait rebondir faisant venir de nouveau à la lumière du jour le nom de François Daulte, cf. « Le trésor sulfureux des Wildenstein », Le Point, n° 2003, Paris le 3 février 2011, p. 81-82 et Harry Bellet, « La police a saisi des œuvres disparues ou volées à l’Institut Wildenstein », Le Monde du 2 février 2011 et Béatrice Rochebouet « Sur la piste des Manets disparus » in Le Figaro du 10 février 2011, p. 27-28 et Yves Rouart « Le tableau de ma tante dans le coffre des Wildenstein ! » (interview avec) in Point de vue n° 3265, Paris, 16 février 2011, p. 30-32. - 41Voir l’article « Musées de Genève : un audit dévastateur » dans Le Temps, Genève le 8 mai 2009 et aussi La Tribune de Genève du même 8 mai 2009.